Il serait naturel de se demander comment un tel incendie a pu éclater, mais il est remarquable qu’il n’ait pas eu lieu plus tôt, et ce pour plusieurs raisons. |
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Le 12 avril 1904, une semaine avant l’incendie, le chef des pompiers de Toronto, John Thompson, avait pris part à une réunion du conseil de contrôle et demandé des fonds additionnels afin d’améliorer les services de lutte contre les incendies de la ville. Dans présentation, il avait déclaré : « Nous prenons de plus en plus de risques chaque année, nous avons vraiment de la chance. » Ses inquiétudes étaient fondées et bientôt sa chance l’abandonnerait. La fin du dix-neuvième siècle avait connu d’immenses progrès dans la conception et la construction des immeubles. L’innovation la plus importante avait eu lieu en 1857 à New York. Cette année-là, Elisha Graves Otis installa le premier ascenseur de passagers. L’ascenseur, combiné avec l’usage accru de la fonte dans les structures, permettait une plus grande marge de manœuvre quant à la hauteur des édifices, dans la pratique comme en théorie. Les constructeurs pouvaient dorénavant concevoir des immeubles de plus en plus haut, faisant ainsi un meilleur usage de précieuses zones immobilières urbaines. Ces changements en eux-mêmes ne représentaient pas un risque accru d’incendies, mais ils les rendaient plus difficiles à contenir. Avec la hauteur croissante des immeubles, les cages d’ascenseurs et les escaliers ouverts facilitaient la progression des flammes entre les étages. |
Cliquer pour un agrandissement (219ko) Dominion Bank Building, S. W. Corner King and Yonge, Toronto, [vers 1890] Josiah Bruce Photographie noir et blanc Code de référence : F 1125-1-0-0-98 Archives publiques de l'Ontario, I0001862 |
Plusieurs immeubles situés dans la zone détruite par l’incendie avaient été construits avant l’apparition de l’ascenseur, mais la plupart avaient toujours trois ou quatre étages. L’illustration ci-dessous, qui date de 1897, montre en détail les travaux de rénovation prévus pour un des immeubles qui allait être détruit dans l’incendie. L’édifice en question n’avait pas d’ascenseur mais l’illustration montre la cage d’escalier ouverte et les solives de bois des étages. Un incendie à peu près n’importe où dans l’immeuble pouvait s’étendre rapidement. |
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Cliquer pour un agrandissement (250ko) No. 75 Bay Street, Proposed alterations for Mr. Charles Walker, 22 février 1897 D. B. Dick, architecte Dessin Collection J. C. B. et E. C. Horwood Code de référence : C 11-349-0-1 (360) 2 Archives publiques de l'Ontario |
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La plupart des édifices qui ont brûlé étaient construits de solives de bois ouvertes et avaient des toits à mansardes, des lucarnes et des cadres de fenêtres en bois qui prirent feu rapidement. La majorité possédaient de vastes quantités de matériel combustible. Seulement trois des immeubles étaient équipés d’un système de gicleurs. |
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Cliquer pour un agrandissement (216ko) Confederation Life Building (Yonge and Richmond Sts.), Toronto, [vers 1890] Josiah Bruce Photographie noir et blanc Code de référence : F 1125-1-0-0-26 Archives publiques de l'Ontario, I0001812 |
Les conditions à l’extérieur des immeubles rendaient elles aussi les conditions de travail des pompiers difficiles. L’utilisation de l’électricité se répandait et l’ensemble du quartier était un labyrinthe de fils aériens. Cela rendait difficile, voire même impossible, l’utilisation d’échelles pour atteindre les étages supérieurs. La faible pression dans le réseau d’alimentation en eau que possédait la ville à l’époque rendait les étages supérieurs hors de portée des lances à incendies, ce qui exacerbait le problème. De plus, une bonne partie de l’eau n’atteignit pas la cible en raison des forts vents ou gela du fait de la basse température. |
La plupart des sociétés qui avaient perdu leurs locaux ne tardèrent pas à trouver des locaux temporaires et à reprendre leurs opérations. Bien des leçons avaient été tirées de l'incendie et on institua des changements afin d'en prévenir la répétition. Un système d'alimentation en eau à haute pression fut construit et entra en service en 1909. On changea aussi la façon de construire les immeubles. Le dessin ci-dessous, en date du 7 mai 1904, montre des détails des rénovations prévues à l'immeuble Kilgour. L'immeuble Kilgour, un des seuls à survivre à l'incendie, était l'un des seuls immeubles équipés d'un système de gigleurs. Des portes et des murs coupe-feu étaient prévus dans les plans de rénovations, dans le but d'assurer une plus grande protection. |
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Cliquer pour un agrandissement (190ko) Messrs Kilgour Bros. Premises, 21 Wellington St. W., Toronto, 7 mai 1904 (détail) Burke et Horwood Architects Dessin Collection J. C. B. & E. C. Horwood Code de référence : C 11-1102 (883) 15 Archives publiques de l'Ontario |
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Les fils aériens continuèrent à poser un risque pour les pompiers jusqu'au milieu des années '20, alors que l'on enfouit la plus grande partie du réseau d'alimentation électrique. |